Le stade qu’il nous aurait fallu

Une petite visite à Saint-Gall à l’occasion de Suisse-Lettonie, conjuguée à la formidable affluence de Servette-Lausanne ravivent quelques regrets liés à la conception de notre nouveau stade. Petit tour d’horizon.

Les atouts des Charmilles qu’il aurait fallu conserver

Les Charmilles ont grandement contribué à la popularité du club. Avec ses gradins proches du terrain, son toit coloré et bas et ses tribunes asymétriques, il a toute les caractéristiques d’un stade « à l’anglaise ». 5’000 spectateurs suffisaient à la rendre chaleureux et bouillonnant. Dès le plus jeune âge, on était rapidement séduit par la proximité des joueurs, l’odeur du gazon et l’ambiance.

Servette a toujours été un club très british. Outre le stade, Servette est historiquement un club de quartier, qui a grandi au-delà de ses origines. Son public a toujours préféré les ailiers débordants à grandes enjambées, le football rapide et offensif, les guerriers, et les tacles propres et rageurs des défenseurs aux artistes dribleurs.

Les premiers succès qui ont fait la légitimité du club sont marqués par l’emprunte de l’entraîneur le plus titré de l’histoire, le britannique Teddy Duckworth (9 titres de Champion). Son long règne a fortement contribué à ancrer le club dans les valeurs footballistiques de l’Albion. Les générations futures ont toutes vécues avec cet héritage.

Depuis le déménagement sur l’autre rive, Servette a beaucoup perdu de son identité britannique, et le nouveau stade y a grandement contribué.

Le chaudron de Saint-Gall

La nouvelle AFG Arena de Saint-Gall (18’000 places) est incroyable. Les concepteurs ont su créer un chaudron avec une visibilité irréprochable, à l’instar de toutes les autres nouvelles enceintes du pays. Pour réussir ceci, ils ont construits une enceinte intégralement fermée, des tribunes très proches les unes des autres (grâces à de petits quarts de virages) mais également très proches du terrain, des gradins et un toit en tôle réellement bas.

L’acoustique y est donc parfaite, la tôle et le caisson fermée favorise la résonnance. Vu de l’extérieur le stade est plus impressionnant qu’à Genève bien que plus petit, car la pelouse n’est pas en dessous du niveau du sol. Et c’est encore plus impressionnant si on place au niveau de l’autoroute, car il est construit sur un centre commercial.

Les finitions et l’esthétique globale du concept sont également à la hauteur. Les loges somptueuses s’avancent au-dessus des gradins de la tribune principale, les studios de la tv alémanique sont suspendus, le mélange des verts pour la couleur des sièges est original et très vivant (même vide le stade à l’air complet – et le temps démontrera que les sièges ne vont pas se décolorer en moins d’une année…). L’extérieur est aussi en béton brut, mais le rendu n’est pas aussi triste qu’à Genève, d’une part parce qu’on voit directement les gradins et non des plaques de bétons sensées fermées l’enceinte et d’autre part grâce au contraste avec les pilonnes anthracites qui soutiennent les tribunes et le toit.

Il faut tout de même relever trois petits défauts, les gradins ne commencent pas au niveau de la pelouse, mais un mètre au-dessus (ça casse l’effet british avec le spectateur qui peu serrer la main du joueur), un grillage prive les premières rangées d’une visibilité optimale derrière les buts et le débit de spectateurs est faible, en particulier lors de la sortie.

Quelle capacité pour Genève ?

Pendant sa présidence, Paul-Annick Weiller voulait reconstruire une enceinte d’une capacité de 20’000 places à l’emplacement du Stade des Charmilles. La suite a démontré qu’il aurait fallu l’écouter.

Nous savons tous que la capacité actuelle de La Praille (30’000) est liée à l’organisation de l’Eurofoot et à l’obtention de ressources financières supplémentaires. Même pour la venue occasionnelle de l’équipe nationale 20’000 places s’avèrent suffisantes car les grosses affiches en compétitions officielles ne sont jamais à Genève.

Quand on sait que l’AFG Arena a coûté « seulement » 75 millions de CHF (contre 125 millions pour un stade pas totalement terminé à Genève), on peut se poser des questions légitimes sur la nécessité de bâtir plus grand, quitte à se priver de l’Euro. Ou alors faire comme à Zurich, temporairement augmenter la capacité pour l’Euro, mais est-ce seulement possible dans un petit stade rectangulaire ? (peut-être avant la pose du toit ou en le retirant).

Les défauts de La Praille

Ne soyons pas trop sévère avec La Praille, une enceinte de qualité avec globalement une très bonne visibilité, dont les principaux défauts sont l’absence de finitions, le coût et son manque d’identification au Servette FC. Sur la plan architectural, la plus grosse erreur a été de ne pas essayer de conserver ce qui avait fait le succès du Stade des Charmilles.

Une petite liste non-exhaustive de défauts plus ou moins irritants

  • Gradins derrière les buts trop éloignés du terrain et « arrondis » (en latéral c’est par contre parfait)
  • Grillage inutile au bas des tribunes nord et sud
  • Acoustique détestable (notez que Bâle est encore pire)
  • Tribune de presse digne du Stade de Frontenex
  • Entrées situées au centre des Tribunes
  • Esthétique extérieure immonde
  • Grands espaces vides
  • Finitions globalement inexistantes dans les coursives
  • Espaces VIP dignes d’un wagon de seconde classe des CFF (comment séduire des personnalités fortunées ainsi ?)
  • Sièges roses (comprenez décolorés)
  • Bancs des remplaçants mytheux
  • Installations peu adaptées à l’organisation de concerts (euh non c’est une qualité en fait, cela évite que la pelouse soit trop souvent endommagée)
  • Les contraintes liées aux engagements que la Fondation du Stade a pris à long terme (buvettes, équipements audio-visuels, billetterie, etc.)
  • Gare fantôme (inutilisée)

Heureusement, on a encore la chance d’avoir un terrain en gazon ce qui semble devenir un luxe en Suisse aujourd’hui. Et le second écran géant est apparu à l’occasion de l’Euro.

La majorité des défauts du stade peuvent être corrigés petit à petit par le biais d’investissements. Par contre trois défauts importants à savoir la capacité trop grande, l’acoustique et l’éloignement des tribunes derrière les buts sont irrévocables. Servette ne retrouvera donc jamais un petit chaudron comme à l’époque des Charmilles ou bien comme le FC Saint-Gall aujourd’hui. A moins que nos nouveaux dirigeants aient la volonté de reconstruire un stade…. (on peut toujours rêver).

Martin Eriksen

2 réflexions sur « Le stade qu’il nous aurait fallu »

  1. Il faut dire aussi que l’on a jamais eu l’équipe pour transformer ce stade en chaudron… Moi personnellement, je dirais que c’est une demie-réussite.

    J’aime

  2. Pourquoi les remplaçants n’ont plus leur siège super classe genre siège baquet en cuire? Pourquoi revenir en arrière avec ces minable chaise en plastoque

    J’aime

Répondre à GVA85 Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.