13 ème journée : GRASSHOPPERS-SERVETTE FC : 1-4 (0-1). Le match sous la loupe!

Après son échec mortifiant à domicile lors du second derby du Rhône, lequel constituait une nouvelle défaite au sein d’une période difficile pour le Servette, traversée du désert symbolisée par une abstinence des plus inquiétantes, tous les regards étaient portés en direction du Letzigrund en ce mercredi soir…

Alves en question…

Il se disait, çà et là, que les enjeux pour l’avenir du club s’y jouaient et demeuraient pour le moins capitaux. Dans les coulisses obscures des Grenat, trop souvent impénétrables depuis l’arrivée du directeur sportif Costinha, les tentatives d’explication de ce parcours sinueux s’étaient déjà efforcées de voir le jour. Ou quand l’on parlait, avec insistance, d’un possible changement d’entraîneur en cas de nouvel échec. Si le druide portugais, le magicien Alves, fut brillamment porté aux nues tel un héros il y a peu, les temps ont malheureusement pris la trop fâcheuse habitude d’évoluer en rejetant les repères édictés et les fondements établis. Aussi, certains ont osé remettre en question les compétences de l’entraîneur. Rien de suprenant finalement : le monde du football a toujours été ainsi, après tout. Quand cela ne va pas, l’esprit humain doit chercher à comprendre. Or, les échecs à répétition d’une équipe de football peut contenir tellement de facteurs et de causes imbriquées par un savant mélange de liens si difficiles à décoder qu’il en demeure tellement plus simple, voire réconfortant, de les ramener à une cause unique, à elle seule explicative.

Certains ont osé. Il est tellement plus simple de porter le doigt accusateur sur un seul élément, aussi brillant fut-il, que de s’interroger plus en profondeur, au risque de remuer les incohérences d’une politique sportive qui n’en est encore qu’à ses balbutiements et qui se doit de passer à l’échelle supérieure. Mais les vrais amoureux du club, ceux qui en constituent l’âme, la substance même, ceux-ci ne s’étaient pas trompés. L’hommage appuyé au magicien portugais en fin de match permit de mesurer le crédit qu’ils lui accordent. Comme quoi les souvenirs intenses des moments forts partagés laissent davantage d’émotions chez les vrais fans. Ces réminiscences d’instants glorieux s’impriment à jamais et la reconnaissance qui en découle prend alors de justes proportions. Il y a une forme de respect envers les services rendus. Cela a toujours été ainsi. En tous les cas au Servette. Tous les éléments qui ont permis au maillot grenat de scintiller de mille feux occuperont toujours une place à part dans le coeur des fidèles amoureux de ce club. Mieux, ils en écrivent la légende.

Cette menace qui planait dans l’air était également de nature à faire renaître de leurs cendres les valeurs essentielles qui ont fait vivre ce magnifique groupe. Aussi, le Servette aura fait preuve, tout au long de ce match, de volonté, de solidarité et de cohésion, pour venir à bout, fort logiquement, d’un adversaire bien trop inexpérimenté. Au terme d’une très bonne performance. Logique. Logique car les joueurs cherchaient, au travers de cette victoire, bien plus que les 3 points promis. Ils cherchaient à se prouver à eux-mêmes qu’ils étaient encore capables de marquer, ne serait-ce que pour faire taire les sévères critiques émises à leur égard. Mais ce n’est pas tout. Ils voulaient surtout une chose, la plus importante. Celle de sauver la tête de leur entraîneur. Car un lien très fort s’est forgé avec le temps. Ce lien indissociable, comme celui qui unit son père à ses enfants. Mercredi soir au Letzigrund, Servette a rappelé à ses dirigeants une vérité : s’il demeure quelque chose de fort et de profondément ancré, sur lequel peut se bâtir un projet sportif stable, solide et ambitieux, c’est au travers de ce lien profond qu’il conviendra de le nourrir. Le déroulement de ce match en constitue une preuve pour le moins éclatante, s’il en fallait encore une. 

Le système

Le constat était implacable. Le chiffre placardé partout. 475 ; soit le nombre de minutes passées sur le terrain sans marquer le moindre but. Cela en devenait indigeste. Trop important pour oser encore prendre des gants. Aussi, même si le druide portugais en porte généralement des légendaires, il les aura cette fois-ci sagement laissés à la maison, avec comme seule conviction : la détermination de passer résolument à l’offensive. Un double objectif à l’esprit : se déplacer en terres zürichoises pour y ramener les trois points, mais aussi pour y retrouver le chemin du but. Aussi, guère d’hésitations dans l’esprit du coach avant le coup d’envoi : le recours aux grands moyens s’imposaient et semblaient définir la seule vérité absolue. Ils se concrétisèrent par le biais de différents principes :

  • Le maintien d’une défense à 4 joueurs, mais avec des éléments repositionnés à leur place naturelle : aux côtés de Roderick, Diallo dans l’axe, Ruefli latéral droit et Moubandje latéral gauche. Soit trois changements opérés par rapport au match face au FC Sion, pour un retour vers une logique mieux respectée. Logique mais également souci de l’offensive, avec l’alignement d’entrée de rencontre de deux latéraux capables de manger les espaces et de se porter vers l’avant.
  • L’abandon du fameux triangle médian par la mise en place d’une paire de deux demis axiaux défensifs. L’objectif : se concentrer essentiellement sur les tâches défensives pour récupérer le ballon et le projeter aux avants-postes vers une attaque surpeuplée. Ou comment chercher à se donner les moyens, en l’absence d’un véritable tueur offensif, de densifier ce secteur pour en renforcer la teneur.
  • La reconduction du quatuor offensif entrevu en début de seconde mi-temps lors du dernier match face à Sion. Cette association Yartey-Esteban-Karanovic-Vitkiviez avait fière allure. Nous avions relevé lors de notre dernière analyse la frustration ressentie lorsque le coach avait décidé, au plus fort de la domination grenat, d’y mettre fin trop précocement, avec l’introduction des amorphes Eudis et Saleiro. Il y avait de la graine dans ce quatuor. De la graine à exploiter, à semer. Joao Alves l’avait bien compris. Pour dynamiter son système et le rendre plus tranchant sur le plan offensif, il fallait absolument la cultiver. Et cela, dès le coup initial.

La défense

Elle fut très rarement prise en défaut sur ce match, tant les locaux parurent bien empruntés et démunis, manquant de force de percussion. Aussi, le spectre d’Emeghera doit-il hanter les travées du stade. C’est cette fois-ci Routis qui fut écarté du 11 de départ. A la vue des dernières sorties des Grenat, cela n’avait finalement rien de surprenant. On s’y attendait. Alors que Diallo s’efforçait d’affirmer son potentiel athlétique et sa robustesse défensive, que Roderick trouvait peu à peu ses marques au sein de l’axe central, le français, lui, était en perte de vitesse et se faisait l’auteur de prestations en demi-teinte. Aussi, Joao Alves décida-t-il de s’appuyer, pour ce match, sur ses deux défenseurs actuellement les plus solides (sur l’homme) à sa disposition pour élaborer l’axe de sa charnière défensive. Sur les côtés, il s’appuya sur ses latéraux aux qualités offensives et disposés à leur place naturelle, soit Ruefli replacé sur la droite, et Moubandje sur la gauche.

Si la prestation de la défense fut bonne dans l’ensemble, elle demeura malgré tout entâchée de quelques imperfections. Toujours les mêmes. Ces fâcheuses mauvaises habitudes qui prennent un malin plaisir à persisiter, à s’ancrer dans le mode de fonctionnement. Aussi, on put y voir à nouveau certaines largesses dans le marquage et dans l’agressivité défensives sur les coups de pieds arrêtés zürichois, ainsi qu’une communication approximative dans l’alignement, ce qui d’ailleurs fut lourd de conséquences et amena la réduction du score de l’équipe locale.

De manière générale, cependant, cette configuration apparut comme ce qu’il peut se faire de mieux, probablement, en ce moment au sein du secteur défensif proprement dit du Servette.

Le milieu

On l’a souvent écrit : le triangle médian constitue le point fort de l’équipe. Du moins jusqu’à ce match. Il possède l’avantage de reposer sur un équilibre et une complémentarité efficaces, et permet de quadriller le terrain et d’imposer un certain contrôle sur le jeu. Or, pour ce déplacement, Joao Alves s’était animé d’un esprit différent. Le même que celui qui l’inspire lorsque son équipe est aux abois et qu’elle se doit de renverser la vapeur. Après tout, c’est bien de cela qu’il s’agissait. Le Servette a commencé ce match dos au mur et il se devait de réagir, de se révolter. Comme à l’entame de la seconde mi-temps face à Sion, quand il fut revenu sur le terrain avec la ferme intention de bousculer les circonstances, de provoquer les événements. Le contexte de ce match fut le même.

La recette? Généralement se passer de l’un de ses demis pour y introduire un attaquant supplémentaire. Aussi, Esteban remplaça De Azevedo. Non pas au sommet du triangle. Mais en position légèrement décrochée d’un quatuor offensif d’attaquants remuants. Objectifs parmi d’autres : s’installer très haut dans le terrain, gêner la relance des adversaires et faire de la ligne d’attaque le premier rideau défensif pour récupérer le ballon le plus haut possible. De par son engagement, sa vivacité et son abnégation, Julian avait le potentiel pour remplir son mandat avec brio. Mieux, ses capacités de profondeur balle aux pieds une fois lancé face au jeu, ainsi que son coup d’oeil, pouvaient lui permettre de servir de lance de rampement aux offensives de son équipe. On vit alors un Servette bien plus conquérant, tel que le souhaitait son entraîneur. La stratégie était intelligente et bien pensée.

Alors, le triangle médian doit-il pour autant s’effacer et être rangé aux oubliettes? Pas forcément sûr. Le quatuor offensif y oppose davantage de dynamisme et de tranchants offensifs, de présence aux avants-postes. En revanche, il débouche sur une plus grande séparation entre les lignes. Il en résulte par conséquent un travail de titan pour les deux demis axiaux et une perte de solidité dans le jeu. La faiblesse des ressources à disposition chez l’adversaire du jour leur permit de répondre aux attentes souhaitées. En seront-ils capables face à une équipe mieux fournie et capable d’imposer sa pression sur le jeu? Enigme. Le triangle médian, s’il manque parfois d’impact sur les offensives, présente quant à lui un équilibre qui favorise le resserrement des lignes, la transition et la fluidité. En revanche, s’il aide à bonifier le système tactique grenat en lui apportant de l’homogénéité et de la stabilité, il peine davantage à mettre en valeur et en évidence le potentiel offensif grenat. Pas autant, en tous les cas, que ce que l’on peut appeler désormais le fameux quatuor offensif. 

L’attaque

Ce quatuor offensif, parlons-en justement. Sa force repose sur son côté athlétique. En effet, constitué de joueurs essentiellement vifs et puissants, il possède un rayon d’action important. Aussi, il en résulte un travail de récupération active en permanence. Mais également une occupation des différents espaces offensifs, permettant ainsi des combinaisons et une force de percussion conséquente sur le plan des contre-attaques. Sa composition présente également de l’équilibre et une relative osmose, en fonction des caractéristiques naturelles de chacun, là aussi disposé selon leur vocation : un fer de lance (Esteban) – deux ailiers (Yartey et Vitkiviez) – un attaquant axial amené parfois à décrocher (Karanovic). Le secteur s’en trouve si densifié que la combinaison peut ainsi évoluer avec davantage de liberté. Ainsi, la zone est parfois appliquée et les permutations demeurent possibles, présentant ainsi l’avantage de s’appuyer sur la polyvalence offensive de ces quatres joueurs pour dérouter les repères défensifs adverses. Sur ce match, la quatuor a clairement constitué le premier rideau défensif du Servette, juste devant celui constitué par Pizzinat et Kouassi. Il fut omniprésent dans la récupération avec l’objectif d’empêcher la relance adverse, et rapide dans l’enchaînement pour tendre vers la projection offensive. La danger fut ainsi permanent sur une défense adverse relativement fragile et constamment aux abois.

En définitive, le Servette ramène trois points mérités de ce déplacement aux enjeux primordiaux. La bonne prestation de l’ensemble de l’équipe met en évidence les atouts que peuvent présenter une nouvelle configuration tactique qui avait déjà laissé transparaître de solides arguments par le passé, notamment en début de 2e mi-temps contre le FC Sion à la Praille. Ce système typé 4-2-3-1 est de nature à se rapprocher d’un 4-2-4, tandis que le 4-2-3-1 du triangle médian à celui d’un 4-5-1. Là réside toute la différence entre les deux. Face à un adversaire relativement faible et peu expérimenté, au-devant d’objectifs élevés visant à laisser les calculs de côté pour chercher absolument à trouver le chemin des filets pour débloquer une situation oppressante, l’alternative choisie fut la bonne. Et put ainsi resplendir de mille feux. Las, la blessure d’Esteban est de nature, comme ce fut souvent le cas jusqu’ici, à chambouler à nouveau le système. Ou, en tous les cas, à ne plus pouvoir en retirer autant de substance. En effet, qui mieux qu’Esteban pour occuper ce rôle d’attaquant en retrait? Ce nouveau coup du sort pour un Servette qui n’en avait pas besoin pourrait être de nature à perturber à nouveau un équilibre retrouvé. A voir.

Quoiqu’il en soit, le Servette a renoué avec le succès, tout en réussissant une excellente opération. Il a démontré qu’il était capable de s’imposer tactiquement face à un adversaire direct, de dominer les débats et de le faire exploser défensivement, tout en y retrouvant ses qualités morales et de cohésion qui en font un groupe redoutable. De très bonne augure pour la suite.

Grasshopper Club Zürich – Servette FC  1-4  (0-1)
 
Grasshopper Club Zürich : Bürki ; Menezes, Lang, La Rocca, Bertucci ; Simijonovic, Feltscher (46e De Ridder), Toko, Brahimi (75e Hajrovic) ; Zuber (71e Coulibaly), Mustafi.

Servette FC : Barroca ; Ruelfi, Diallo, Roderick, Moubandje ; Pizzinat (81e Pont), Kouassi ; Esteban (74e De Azevedo) ; Vitkiviez, Yartey (87e Routis) ; Karanovic.  
 
Buts : 10e Karanovic 0-1, 66e Vitkiviez 0-2, 85e Lang 1-2, 92e Moubandje 1-3, 94e De Azevedo 1-4.

Grenat DC

9 réflexions sur « 13 ème journée : GRASSHOPPERS-SERVETTE FC : 1-4 (0-1). Le match sous la loupe! »

  1. Encore une fois, excellente et pertinente analyse de grenat DC. Mais peut-être que Marcos pourrait, le temps du rétablissement de Julian, reprendre le rôle de l’absent… Il en est capable, on l’a vu contre Sion, l’espace d’une mi-temps, pour autant qu’il laisse de temps en temps la possibilité à d’autres de tirer les coups franc!
    En ce qui concerne les critiques adressées à Alves, il y a, à mon avis, 3 entraineurs qui ont particulièrement marqués Servette de leur empreinte indélébile ces dernières décennies: le Chef Snella, le winner Paszmandy, et… l’histoire le dira, le druide Alves…

    J’aime

    1. Merci pour tes félicitations!
      Je te rejoins, je pense effectivement qu’Alves fait partie de la trempe de ces entraîneurs-là, qui ont marqué l’histoire du club. Il y a beaucoup de choses qu’a faites le portugais qui sont de l’ordre du génial : l’osmose dans le groupe, la cohésion, les différents systèmes (toujours ingénieux à quelque part). Bref, il a su transformer le niveau d’un groupe dans son ensemble et l’amener de la classe de Chl à celle de la SL. Et cela, au-delà des résultats. Bref, c’est ce que l’on devrait attendre d’un entraîneur : soit augmenter la valeur ajoutée de chaque joueur.
      Dans les entreaîneurs que j’ai particulièrement aimés, je citerai aussi Petkovic.
      En ce qui concerne l’absence d’Esteban, je pense effectivement que c’est De Azevedo le remplacera. C’est la meilleure alternative. Mais, en revanche, le système prendra forcément un caractère différent. Car le brésilien est un joueur différent. Esteban a plus de force de pénétration, davantage de profondeur et de rayon d’action. De Azevedo est plus typé milieu axial, offensif. Alors qu’Esteban est un attaquant en retrait. Il en résulte un système davantage percutant avec la présence de Juli.
      Maintenant, l’adversaire ne sera pas du même niveau. Contre GC, le système avec un attaquant en retrait était sans doute la meilleure alternative. Là, contre Xamax, ce sera autre chose. Peut-être que, dès lors, la présence de De Azevedo se révèlera précieuse. A voir.
      A moins encore qu’Alves nous sorte un coup de son chapeau magique.. 😉

      J’aime

  2. Ces articles sont de bonne qualité certes, mais néanmoins je me permets de recommander a l’auteur de les raccourcir un peu ce qui rendrait la lecture plus facile d accès et moins fastidieuse! Bonne matinée les EDS!

    J’aime

    1. Grenat DC y travaille, je te rassure! Mais il a tellement d’idée qu’il faut bien les mettre quelque part!

      Mais je suis sûr qu’il y arrivera bientôt!

      J’aime

    2. Je vais m’efforcer d’améliorer ce point et de tenir compte de cette remarque. Comme le dit Julian, j’y travaille, mais j’avoue que j’ai encore de la peine 😉
      Mais comme le Servette cet après-midi, je dois y croire :-))

      J’aime

  3. Autre sujet
    , Thoune a perdu, ils sont à 1 point
    en gagnant…..
    Cela permaitrait de regarder le classement
    devant plutôt quederrière.
    C’est une vision importantissime….
    Contre Xmax : lle couteau entre les dents..,Ouais !

    J’aime

Répondre à John Erik Sinval Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.