
Rarissimes au 20ème siècle, les rencontres entre Servette et Thoune se sont par contre multipliées ces dernières années. Le hasard a aussi voulu que jouer contre Thoune coincide souvent pour les Grenats avec des rendez-vous symboliquement important : de la victoire en Coupe contre les Oberlandais, première lueur après la faillite, au match du mois de mars dernier qui aurait pu être l’ultime de l’histoire servettienne en passant par le premier match du retour dans l’élite en juillet 2011. Le Servette-Thoune du 29 novembre 2008, alors que Servette pointe en queue de classement, est également resté dans bien des esprits : ce fut la première victoire à domicile de l’ère Pishyar et une saveur de résurrection planait sur la Praille !
Avant le début de la saison 2008-09, le club était stérilement assis entre deux chaises. Le Catalan Viñas s’accrochait au pouvoir alors que Majid Pishyar piaffait d’impatience, projet ambitieux en mains. Outre cinq nouveaux joueurs (Jérôme Schneider, Mirko Quaresima, Vincent Ruefli, Anthony Braizat et Alexandre Da Costa), l’équipe disposait d’un nouvel entraîneur Michel Sauthier, encore actif à 50 % avec UGS et engagé au pied levé à la place de Jean-Michel Aeby dix jours avant la reprise du championnat. Si on ajoute à ce contexte trouble une avalanche de blessés, on comprend aisément que ce qui devait arriver, arriva : Servette s’effondra ! 1 points en 7 matchs. L’ambiance chez les fans qui étaient restés fidèles se transforme en colère ouverte contre Viñas. La presse le présente aussi maintenant comme un frein à la progression du club. La politique des petits pas a échoué. L’entraineur Sauthier ne se rend pas dans les vestiaires durant la pause pour apporter des corrections, il s’installe désinvoltement sur le banc des remplaçants. C’était le pire départ imaginable et il y avait peu d’espoir ! Les possibilités de transferts étaient déjà presque épuisées. L’argent manquait…

Suite à une défaite 1:5 à la maison contre le néo-promu Bienne, le président Viñas démissionne. Victimes de menaces violentes contre lui et sa famille, il offre néanmoins un ultime cadeau à Servette : Gérard Castella, l’entraîneur du titre de 1999, dont le salaire est provisionné jusqu’à la fin de la saison pả sé soins. Lors de l’assemblée générale, Viñas déclare amèrement: « J’ai beaucoup sacrifié pendant quatre ans pour Servette, du temps et de l’argent. Aujourd’hui, je transmets un club sain financièrement à mon successeur. Cela, on ne peut pas encore le voir. ». Le nouveau président est Majid Pishyar. Il arrive avec un nouvel élan et des idées.
Sous la houlette de Gérard Castella, l’équipe connaît un modeste regain de forme. L’ancien Servettien David Gonzalez revient du Valais pour porter le numéro 1, Tibert Pont s’épanouit comme coureur de fond entre le milieu de terrain et la défense, le groupe gagne en cohésion mais les résultats ne sont pas folichons pour autant, fin novembre, Servette est toujours scotché à la dernière place. Puis vint le match contre Thoune… Quatrièmes du classement, solides à l’extérieur, les Bernois constituaient a priori un adversaires redoutable pour les Grenats mal en point.
Enfin un des match de référence !
Les 1450 courageux spectateurs de la Praille sont éberlués d’emblée : Servette développe un football allègre à une touche de balle, gagne de nombreux duels grâce à une combativité retrouvée et surtout … marque ! Vitkevietz avait montré le chemin à ses coéquipiers dès la dix-huitième minute en surgissant à bon escient sur un centre de N’Tiamoah pour marquer de la tête. Boughanem double ensuite le score en déviant de la tête un corner de Braizat puis Jérôme Schneider ajuste de la tête la lucarne du but thounois suite à un coup-franc de Bouziane. Thoune, réduit à 10, encaisse un quatrième but en début de seconde mi-temps (centre de Schneider sur la tête de N’Tiamoah). Un beau but permet ensuite au FC Thoune de sauver l’honneur. Quatre buts de la tête dont deux consécutifs à des balles arrêtées, ce nouveau réalisme portait sans doute l’empreinte du nouveau coach Gérard Castella. Relevons encore le gros match de Lionel Pizzinat associé à Girod en défense. Seule petite ombre au tableau : entré en fin de match, Vincent Ruefli, très jeune joueur au potentiel évident avait raté tout ce qu’il avait entrepris…

Un président tout sourire
Le nouvel homme fort du Servette FC avait de quoi sourire à l’issue de cette partie. Sur cette lancée, son équipe ne pouvait que sauver sa peau en Challenge League et il pouvait le coeur léger se mettre à la tâche pour réaliser ses nombreuses promesses. Face à la presse, il annonce que les bases de la SA sont jetées et que le projet est en voie de finalisation. Il insiste également sur la prochaine mise en place d’un organigramme professionnel à tous les niveaux. Une section féminine du Servette FC est censée voir le jour.
L’embellie était fragile…
Le président Pishyar n’était pas le seul à apprécier ce succès servettien à sa juste valeur. « on a aimé repartir du stade avec la fierté d’être servettien » écrit ainsi, tout tourneboulé, l’étoile montante de la blogosphère sportive romande Oscar Obradovic sur http://www.enfantsduservette.ch dans la rubrique « on a aimé ». Ses analyses sentimentales du match, aujourd’hui âprement débattues, ne suscitèrent ce jour-là qu’un seul commentaire du lectorat : un certain Olaf Reuth releva une erreur dans l’énoncé du résultat. Quant à Julian Karembeu, jeune pousse du photoreportage sportif, il poste le lendemain des photos du match. Et même si, comme le fait justement remarquer Oscar Obradovic, fournir une loupe aurait été avisé (à l’époque le site n’attirait guère plus que 300 lecteurs, l’investissement aurait encore été supportable), on distigue toutefois clairement une masse de joueurs grenat venus saluer le dernier carré des fidèles de la Tribune Nord avec, pour la première fois de la saison à domicile, le sourire de la victoire aux lèvres.

Le week-end suivant, Servette l’emporte à Gossau et passe l’hiver dans une situation un peu moins inconfortable que prévu. A la reprise toutefois, les vieux démons reviennent, le club piétine, Gérard Castella est remercié, Servette aligne les matchs nuls et ne se sauve qu’au forceps dans les ultimes journées. Il faudra encore deux saisons de Challenge League pour rejoindre l’élite.
Suite et fin de la présidence de Majid Pishyar
Durant ces deux saisons, le président Pishyar soufflera le chaud et le froid en multipliant les projets, malheureusement trop souvent limités à des effets d’annonce, en affichant des ambitions fortes tout en ne se donnant pas forcément les moyens de les réaliser. Aux yeux du grand public, il incarne toutefois longtemps la renaissance tant attendue du Servette FC. Avec la promotion acquise le 31 mai 2011, sa popularité est évidente. Toutefois, isolé, ou s’isolant lui-même en ayant dégoùté successivement plusieurs proches collaborateurs, il recourt alors de plus en plus fréquemment à une communication comminatoire qui écoeure ses destinataires. Sa gestion prendra fin en mars 2012, il laisse un club sportivement compétitif mais exsangue financièrement (dépôt de bilan). Le repreneur providentiel, Hugh Quennec, sans doute pour faciliter le marchandage de la transition, lui offre alors un statut de président d’honneur, une reconnaissance adroite mais inattendue pour un homme qui avait failli être le fossoyeur du club grenat et qui n’est toujours pas à l’abri d’une procédure judiciaire.
Le match Servette-Thoune peut toujours être visionné sur le site officiel: http://www.servettefc.ch/fr/actualite/article-2421.htmlicile
La dernière chronique : Eric Burgener, dans la veine des grands gardiens lémaniques
Jacky Pasteur et Germinal Walascheck
bravo et merci Germinal.
comme d’habitude, quel bon boulot.
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Un très bon article à ajouter au palmarès de Jacky Pasteur et Germinal Walascheck. Comme à chaque fois, intéressant, passionnant et bien raconté!
BRAVO
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Bravo, et merci pour avoir occupé mon samedi après midi pluvieux 🙂
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