TDG (10 mai 2013): Servette répond présent et s’offre le droit d’y croire encore

En battant Thoune 2-0, les Grenat reviennent à quatre points de Lausanne. Belle performance, prometteuse même

Et si quelque chose d’indéfinissable s’était produit? Si Servette avait touché du doigt une espèce de rêve improbable, l’idée d’un monde meilleur, le chemin vers le champ des possibles? On ne sait pas encore si tout cela est vrai ou seulement virtuel, il faudra d’ailleurs encore bien des efforts aux Grenat pour envisager vraiment ces perspectives, fuyantes jusque-là, comme de solides dessins. Mais hier, en battant Thoune 2-0, Servette s’est au moins offert le droit d’y croire. Les Genevois sont toujours derniers, peut-être, mais un peu moins qu’avant. Et cela fait toute la différence: Lausanne n’est plus qu’à quatre points. Et Servette, qui doit encore rattraper un match contre Sion et jouer à la Pontaise, ce qui pourrait être le match de la peur, a retrouvé des couleurs.

Une bonbonne d’oxygène

Cette espérance, Servette est allé la chercher. Thoune, la bête noire des Grenat, a plié après la pause face à une équipe genevoise qui en voulait tout simplement plus. Et qui avait conscience de devoir saisir sa chance. Oui, quand tout n’est plus qu’intentions, des soupçons d’espoirs renaissent. Ils étaient entretenus depuis la veille, avec la défaite de Lausanne contre Sion. Une occasion à saisir? Plus, bien plus que ça: une véritable bonbonne d’oxygène pour qui végète dans les profondeurs, au bord de la suffocation. Encore fallait-il la saisir.

Et contre un Thoune qui est sans doute, presque à la surprise générale, l’une des meilleures équipes depuis la reprise, l’entreprise n’était pas une mince affaire. La chance de Servette, pourtant, c’était de savoir qu’il n’avait plus le choix, que seule une victoire lui permettrait de croire encore en l’impossible, le rêve d’un maintien en Super League. Alors les Grenat ont bien commencé le match. Mieux que d’habitude, sûrement.

Servette en 4-4-2

Articulés presque en 4-4-2, comme contre GC samedi soir, les Servettiens étaient surtout plus hauts sur le terrain et plus agressifs. Avec un Vitkieviez fréquemment à hauteur de Karanovic, un duo Pasche-Kouassi prompt à l’interception, cela a d’abord suffi à surprendre Thoune. Pressés dans leur camp, les Bernois ont eu besoin d’un quart d’heure pour refaire surface. Mais c’est encore et toujours sur le plan de la concrétisation que le bât a blessé en première période pour Servette.

Ce n’est pas tout de vouloir, encore faut-il pouvoir. Et dans cette première période tendue, après quinze bonnes premières minutes, Servette peinait à se créer de vraies occasions. De celles qui font peur à l’adversaire.

Pasche impressionnant

L’adversaire? Un Thoune bien emprunté en fait. Qui n’aura soufflé le vent de la frayeur qu’en de très rares opportunités. Sur un centre de Ferreira par exemple. Cela ne donne que plus de corps à la performance servettienne. Parce qu’après la pause, tout devait basculer. Dans le bon sens pour les Grenat et malgré certains errements de M. Kever, l’arbitre. D’abord grâce à Alexandre Pasche. C’est lui, impressionnant hier soir, qui a volé un ballon de plus au milieu, avant d’avancer et de servir Tréand: le tir, pas cadré, touchait la main de Reinmann et finissait dans la cage de Faivre, dépité. Un coup du sort, mais une récompense méritée au fond. Viendra ensuite le 2-0: un coup franc de Rüfli pour Kusunga, qui s’élevait haut, très haut, pour remettre sur Kouassi qui fusillait Faivre. Chapeau aux Grenat, qui ont répondu présent. Mais qui devront le faire encore plusieurs fois. Et dès dimanche, à Bâle.

Servette – Thoune 2-0 (0-0)

Stade de Genève, 4413 spectateurs.

Arbitre: M. Kever.

Buts : 57e Reinmann (autobut) 1-0; 70e Kouassi 2-0.

Servette : Barroca; Rüfli, Kusunga, Mfuyi, Moubandje; De Azevedo, Kouassi, Pasche, Tréand (91e Moutinho); Vitkieviez (77e Eudis), Karanovic (88e Pizzinat).

Thoune : Faivre; Lüthi, Reinmann, Schindelholz, Schirinzi; Zuffi; Steffen, Bättig (17e Siegfried), Krstic (62e Sadik), Ferreira (46e Wittwer); M. Schneuwly.

Avertissements: 43e Schindelholz (jeu dur), 55e Steffen (jeu dur), 70e Reinmann (jeu dur), 74e De Azevedo (jeu dur), 75e Vitkieviez (jeu dur), 83e Tréand (jeu dur), 89e Lüthi (jeu dur).

Expulsion: 90e Luthi (2e jaune pour réclamations).

Des hommes en forme au bon moment

Si Servette a aujourd’hui le droit d’y croire, c’est qu’il s’en est donné les moyens hier soir. Comment? En pouvant compter sur des hommes en forme. A commencer par Vincent Rüfli. N’en déplaise à certains, il fait partie des meilleurs latéraux de Suisse. Et quand il est débarrassé de ses ennuis physiques, ou obligé de dépanner en jouant à gauche, contre nature, il le démontre. Tout comme Moubandje d’ailleurs sur le côté gauche. Hier, les percussions sur le flanc droit ont posé bien des problèmes à Thoune. «Je me sens mieux à droite, c’est sûr, soufflait Rüfli. Mais c’est toute l’équipe qu’il faut féliciter.» Alexandre Pasche en fait partie. Tout comme Kouassi, omniprésent au milieu. «Nous devons continuer sur cette lancée, nous montrer décisifs, montrer ce que nous avons dans le ventre», précisait Pasche. La preuve qu’avec des joueurs en forme au bon moment, tout redevient possible. Même s’il faudra aussi gérer ce sprint final. Le président Quennec n’était pas le moins heureux du groupe après cette victoire. Mais lui, il mène un combat administratif, pour obtenir la licence et boucler les comptes. «Tout va bien, assurait-il. Tout n’est pas encore officiellement conclu, mais c’est sur le bon chemin. Nous pourrons donc équilibrer le budget et celui de la saison prochaine aussi. Nous pourrons faire face à n’importe quelle demande de la ligue. Mais en attendant, je savoure cette victoire. Cela relance la fin de saison, ces six derniers matches.» Enfin, Sébastien Fournier avait le sourire. «Chapeau aux gars pour la seconde période, lançait-il. Nous avons joué agressivement. Nous avons eu la chance de marquer sur un coup de main. Mais pour une fois que la chance nous sourit…» Il ne s’en plaindra pas. «Mais restons calmes, tempé- rait-il aussitôt: la route est encore longue.» D’autant plus qu’elle passe par Bâle dimanche. D. V.

Daniel Visentini