Rencontre avec Valer Nemeth (TDG, lundi 10 juin 2013)

REVUE DE PRESSE

TDG, lundi 10 juin 2013

La nostalgie du grand Servette

Voilà un retraité que son dynamisme pousse à exercer encore sa profession d’architecte aux côtés de son fils Marc, après avoir déjà contribué à la construction de plusieurs édifices. Passé le temps de la gloire et de la notoriété, Valer Nemeth apparaît comme un homme discret mais si chaleureux lorsqu’il se profile en pleine lumière. Ambrée de grenat. La couleur du maillot de la prestigieuse équipe de football de Hongrie, puis celle du Servette, qu’il a longtemps défendu.

Lui qui, en fin de carrière, entraîna la réserve des Grenat, puis Annemasse et Veyrier porte un regard déçu sur le Servette d’aujourd’hui: «J’ai eu un pincement au cœur avec la récente relégation. Mais le mal ne date pas d’hier. Les causes en sont à la fois sportives et politiques. Elles passent notamment par le manque avéré, depuis longtemps, de soutien au secteur de formation, essentiel à mes yeux. Le football doit s’apprendre à la base. Je constate que, peu à peu, le club a perdu de sa substance», regrette-t-il.

Une génération spontanée

Derrière son apparente réserve se révèlent peu à peu son sens de l’homme, mais aussi la finesse de son esprit et l’humour qui en découle. Le Hongrois accepte de revenir sur son son passé, à la fois glorieux et émouvant. On apprécie. «Au début des années cinquante, je me suis retrouvé à Györ, la ville la plus proche du bourg où je suis né. Pour y poursuivre mes études de technicien industriel. Le système de sport-études existait déjà. Très en avance en regard de ce qui se passe actuellement à Genève…»

Très vite, les exceptionnelles qualités sportives, et particulièrement de footballeur, de Valer Nemeth sont reconnues: «J’ai joué dans des sélections juniors cantonales, puis régionales avant d’intégrer l’équipe fanion qui évoluait en 2e division. J’ai ainsi disputé un match amical contre notre équipe nationale. Cela m’a permis d’être repéré et sélectionné avec les juniors magyars en 1955. Il s’agissait d’une génération spontanée de joueurs d’exception, provenant en majorité de trois clubs de Budapest: Honved, Ferencvaros et Ujpest. Une complicité unique était née entre eux. La cruelle défaite face à la République fédérale d’Allemagne en finale de la Coupe du monde 1954 causa un véritable traumatisme. Mais pour nous, juniors, l’honneur était immense de voyager avec eux et de défendre leur conception novatrice du football.»

Suivirent les tragiques événements qui décidèrent du destin de notre interlocuteur. «Nous étions en tournée en Angleterre et en Autriche lorsque survint la révolution de 1956 en Hongrie. Nous ne pouvions plus rentrer au pays et je n’ai plus revu ma mère pendant quinze ans. Notre coach, Eugen Vincze, avait un contact en Suisse. Nous sommes finalement arrivés à Genève grâce à Karl Rappan, entraîneur du Servette de l’époque. Notre sort s’est scellé à main levée, lors d’une réunion au café de la Bourse, dont il était le propriétaire. Il lança «Qui veut rester?» Nous fûmes six à accepter. Pour nous, c’était la possibilité de poursuivre notre carrière dans le football, de nous intégrer dans la vie professionnelle; un piège administratif qui nous livrait aussi pieds et poings liés au club…»

Eléments de base

Après les départs de Varhidi, Gelley et Keresztej, Nemeth et ses compères Didier Makay et Peter Pazmandy restèrent seuls à Genève. Ils allaient constituer les éléments de base du onze servettien durant de longues années. Remportant au passage le titre en 1961 et 1962, puis la coupe en 1971. «La personnalité charismatique de Jean Snella m’a beaucoup marqué. Novateur dans l’entraînement et le style de jeu: avec lui, tous les joueurs se trouvaient parfaitement à leur poste. Ce fut une période bénie. La magie ne se renouvela pas une décennie plus tard. Mais nous n’étions plus les mêmes…»

Jean-Antoine Calcio

Valer Nemeth Bio express

1938 Naissance le 15 avril en Hongrie.

1952 Entre au Technicum de Györ.

1955 Junior dans l’équipe de Hongrie.

1956 Arrive en Suisse, puis à Genève.

1958 Première apparition en équipe fanion du Servette en décembre.

1961 et 1962 Champion suisse sous la houlette de Jean Snella. Puis, il épouse Rose, qui lui donne deux fils, Dan et Marc.

1971 Vainqueur de la coupe de Suisse avec Jean Snella.

1976 Dernier match avec les Grenat, dirigés par Jürgen Sundermann.

2013 Il déplore la relégation du Servette.

4 réflexions sur « Rencontre avec Valer Nemeth (TDG, lundi 10 juin 2013) »

  1. Valer Nemeth,
    Chocolat de son surnom (je n’ai jamais su pourquoi), c’est un des plus grands ailiers droit que le Servette ait connu. Ses débordements irrésistibles, grâce la plupart du temps aux une-deux fulgurants effectués avec la complicité de son compère intérieur droit Dédé Bosson, faisaient souvent pleurer de désespoir les latéraux chargés de le marquer, et ses centres dévastateurs depuis la ligne de fond pour la tête de Jacky Fatton ou le pieds de Walter Heuri finissaient la plupart du temps au fond des filets adverses… Mais ça c’était une autre époque quand le football se jouait avec 5 attaquants, ou le spectacle était souvent au rendez-vous et ou les buts tombaient comme s’il en pleuvait! Nostalgi, Nostalgie…

    J’aime

  2. Bel article en effet. Merci aussi à John Erik Sinval pour son complément tout aussi sympathique.

    Et oui, le football et le monde ont beaucoup changé en 60 ans; et plus rien n’est comparable.
    Le point sur la formation est un élément intéressant – à y réfléchir un peu, il est peut-être bien une des causes profondes des dysfonctionnements du SFC; mais pour sûr, ce n’est pas la seule. Des jeunes joueurs avec du talent, il y en a toujours (peut-être un peu moins?) mais comment Servette gère ces talents est sans doute un point qui mérite qu’on parle de : VRAI centre de formation, de VRAIS réseaux de détection, de MEILLEURE gestion des contrats, de NOUVELLES perspectives… et qu’on sorte d’une gestion de la survie installée sans doute depuis la faillite de 2005.
    Là encore, ça nous renvoie vers le projet de Quennec et ses troupes.

    J’aime

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.