Il va fêter ses 20 ans dans quelques jours et il incarne déjà une part du renouveau grenat. Rencontre avec un espoir qui promet

La tentation de la facilité est grande. Parce que quand tout paraît simple, quand l’histoire s’inscrit dans une logique apparemment évidente, il n’y a plus de questions. Kevin Bua, qui fêtera ses 20 ans le 11 août, est passé des M21 de Servette à la première équipe. Il a du talent, il a été titularisé contre Wohlen et il est à l’origine du but de la victoire et d’autres actions chaudes. Une belle histoire, oui. Peut-être même trop simple.

Si Kevin Bua attire bien des regards aujourd’hui, il a dû batailler ferme pour se faire une place au soleil. Des juniors à Servette, Carouge et Plan-les-Ouates. Puis la 2e ligue et Vernier aussi, avant de revenir à ses premières amours grenat. Un parcours presque sinueux, loin des sélections nationales. Il aura fallu un déclic. Et il s’est produit la saison passée, avec les M21 servettiens d’Oscar Londono (lire ci-dessous ). Suffisant pour le propulser en première équipe avec Fournier.

A 20 ans, il a su saisir sa chance. Bua, c’est du talent, un potentiel, une facilité naturelle pour ce milieu offensif droitier qui aime jouer à gauche. Sforza, spectateur à Wohlen, a bien aimé «ce jeune joueur qui percute et qui est très bon». Bel hommage. Mais Kevin Bua garde la tête froide.

Kevin, a quoi pense-t-on quand on est jeune, qu’on intègre la première équipe de Servette et qu’on est titulaire dès le premier match?

J’ai déjà des rêves plein la tête. Pour Servette, pour moi. Etre dans la première en était un, par exemple. Sinon je m’imagine bien passer beaucoup d’années ici, gagner des matches, remonter en Super League.

Vous étiez pourtant courtisé par des équipes de l’élite, comme Young Boys et Grasshopper, mais vous vous êtes engagé avec Servette. Pourquoi?

C’est toujours gratifiant de voir que l’on intéresse de telles équipes, cela donne envie de travailler plus encore. Maintenant, par rapport au plan de carrière, je pense avoir plus de chances de jouer ici. Et puis, c’est Servette! Il y a un vrai projet. J’en ai parlé avec Loïc Favre, avec Sébastien Fournier aussi. Ce que j’ai entendu était très motivant.

Et cela s’est vérifié dès le premier match, avec vos débuts en tant que titulaire…

Oui, c’était bien. J’ai conscience de la chance qui m’a été offerte. Si on me donne des minutes de jeu, je les prendrai et les utiliserai pour me montrer.

Avez-vous eu une petite appréhension avant cette première rencontre?

Un peu, oui, c’est vrai. Mais pas trop de pression en fait. Mes coéquipiers m’ont aidé. Je m’y étais préparé aussi. Et puis au fil des minutes, cela allait de mieux en mieux. Il y a eu un petit round d’observation, en fait. Le temps d’assimiler le tout, le placement.

Premières impressions?

Agréablement surpris. Je pensais que le jeu serait plus dur, plus musclé, que ça «taperait» plus. Eh bien, non. Ça joue bien au foot. L’intensité est nettement supérieure à ce que je connaissais avec les M21.

On vous a vu décisif sur le deuxième but, avec ce tir détourné par le gardien adverse, qui permet ensuite à Tadic de conclure de la tête. Fier?

Oui, bien sûr. J’ai joué, Servette a gagné, il y a eu ce tir, oui. Le plus important, c’est les trois points. Mais je suis heureux, forcément.

Rêvez-vous déjà à votre premier but avec la première?

Un peu, oui. Je m’imagine marquer au Stade de Genève, avec une victoire à la clé. Ce serait un peu la cerise sur le gâteau. J’espère que cela arrivera vite…

Quels sont les joueurs que vous admirez?

Petit, j’avais des posters de Zidane et de Raul dans ma chambre. Je suis Espagnol d’origine, Madrilène, alors je tiens pour le Real. Et ces deux joueurs, je les admire, oui. A mon niveau, je travaille pour leur ressembler. Mais je sais qu’il y a encore un très long chemin.

Vous êtes désormais un jeune footballeur professionnel. Est-ce facile de se décider à vivre du football?

Pas forcément. J’ai une maturité. Je voulais avoir un papier, au cas où, pour assurer mes arrières. J’ai fait mon stage de maturité dans la police, un métier qui m’intéressait. Mais maintenant, je ne me consacre évidemment qu’au football. J’avais de toute façon cela en moi, dans un coin de ma tête. Alors j’en profite.

On sait que Fournier ou Zuberbühler ne veulent pas entendre un joueur parler de promotion. Kevin, Servette sera-t-il promu à la fin de la saison?

Bon, comment dire… Il faut prendre match après match. Voilà. Franchement, nous n’en parlons pas entre nous, dans le vestiaire. On verra bien plus tard, mais là, nous n’en sommes qu’au tout début de la saison. Ce qui est important, c’est davantage de tout donner pour porter le projet grenat. Servette a un passé glorieux. Je veux vivre avec ce club un avenir glorieux aussi.

Daniel Visentini

Londono: «Bua est fort!»

Oscar Londono, à la tête des M21, a entraîné Kevin Bua la saison passée. Il analyse un joueur qu’il connaît bien. «Je suis content de voir des jeunes dans la première et Bua titulaire, explique Londono. Au fond, ce n’est pas l’âge qui compte, mais le talent. Et Kevin en a. Bua est fort! Il a toutes les qualités pour réussir. La saison passée, mon message aux M21 était le suivant: comportez-vous déjà comme des joueurs professionnels. Kevin l’a compris. Il y a eu un déclic, il a franchi un cap, lui que nous étions allés chercher à Vernier. Il a eu besoin d’un temps d’adaptation, mais il a ensuite été fabuleux lors de la 2e partie de saison. Passeur, marqueur. Le voici désormais avec Sébastien Fournier.» Ce dernier se félicite de pouvoir compter sur Bua. «Il s’est montré à son avantage durant toute la préparation, assure-t-il. Il a un profil très intéressant: un joueur puissant et technique, qui élimine son adversaire en un contre un. C’est précieux. Mais il a encore beaucoup de travail qui l’attend pour confirmer, pour être régulier. A nous de gérer tout cela avec lui. Mais ses qualités naturelles sont déjà bien là.»

D.V.

Un gardien et un préparateur

On croyait Servette concentré sur la recherche d’un attaquant et d’un milieu de couloir offensif. Hier, les Grenat ont pourtant engagé un gardien germano-philippin. Il s’agit de Roland Müller (25 ans, 180 cm), qui vient de Duisburg après avoir joué avec Cologne, où il est né.

Il faut voir dans ce transfert (un an, avec option pour deux saisons de plus) la patte de Pascal Zuberbühler. Le chef des portiers grenat connaît bien Müller pour l’avoir entraîné en équipe nationale philippine. Il ne tarit pas d’éloges à son sujet. Ce transfert «peu coûteux» ne remet pas en question la recherche d’autres renforts.

Reste que Servette se retrouve avec quatre portiers: Barroca, Müller, Gonzalez et Guedes (pour les M21). C’est Gonzalez qui en fera les frais (le club devrait chercher à le prêter ou à le transférer), lui qui n’a qu’un an de contrat encore, contrairement à Barroca, qui a prolongé de trois ans. Parallèlement, les Grenat ont enfin un préparateur physique en la personne de Leonardo Ceccherini. Ce dernier officiait à Sienne la saison passée. Il s’est engagé pour un an. D.V.