Edmond Isoz: « la Suisse n’a pas le potentiel sportif pour accueillir plus que 10 équipes qui tiennent la route. »

Le Directeur de la Ligue Suisse Professionnelle de Football nous a accordé un long entretien. Dans cette première partie, Edmond Isoz nous explique pourquoi la formule à 10 équipes va durer.


EdS : Monsieur Isoz, la première question que j’aimerais aborder avec vous est celle de la place d’équipes comme Servette ou Lausanne dans le football Suisse. Pourquoi s’entête-ton à n’avoir que 10 équipes dans le football de haut niveau ?

Edmond Isoz : On ne s’entête pas, il n’y a tout simplement pas le potentiel. Le football, pour être joué au plus au niveau, nécessite de la qualité or il n’y a pas assez de joueurs étrangers de qualité en Suisse. Même le FC Bale ne peut pas s’en payer. On sait qu’un club qui monte de Challenge League en Super League change jusqu’à 9 joueurs pour pouvoir espérer se maintenir en Super League. Donc pour nous, comme nous l’avions décidé il y a quelques temps et reconfirmé récemment, la Suisse n’a pas le potentiel sportif pour accueillir plus que 10 équipes qui tiennent la route.

EdS : Et une formule à 12 équipes ?

Edmond Isoz : Ce n’est pas réaliste. Cela ferait 33 matchs avec un vrai problème sur le plan sportif car une équipe peut jouer ou recevoir 2 fois la même équipe dans une saison ce qui pause un problème d’équités sportive et économique. Cela implique aussi l’introduction de la barre dont on ne veut plus ! Elle donne des contraintes économiques énormes pour le club concerné. Notre conviction est donc claire, et elle n’est pas contre Lausanne ni contre Servette, il n’a pas de place pour plus que 10 équipes en Super League.

EdS : Mais on ne peut nier que lorsque l’on réunit 15’000 personnes pour un match de foot en Suisse, on répond aux critères économiques de viabilité.

Edmond Isoz : Il faut tout d’abord savoir que le budget moyen d’un club de Super League est de 18 Millions. Sans Bale et Young Boys, c’est 12 Millions. Si on regarde la saison passée, les 2 derniers étaient les 2 plus petits budgets. C’est le cas cette année pour Saint Gall. La situation est donc beaucoup plus compliquée que réunir 15’000 personnes pour un Derby. Pour Servette, si vous enlevez Monsieur Pishyar (son apport financier), le budget est celui d’un club de Challenge League.

EdS : Vous soulevez donc le nœud du problème. La Challenge League n’est pas viable pour Servette et comme il est très compliqué de monter avec une seule équipe promue, il y a un risque de voir disparaitre le club si il ne monte pas rapidement.

Edmond Isoz : Notre réflexion n’est ni pour ni contre quelqu’un. Nous cherchons simplement à avoir le championnat de la meilleure qualité possible. Aujourd’hui nous n’avons plus que des étrangers de deuxième ou troisième catégorie dans les clubs, et nos jeunes joueurs talentueux partent car ils ont plus de talents que les joueurs étrangers moyens. Si on agrandit l’ASL, on va diluer le talent. Tout le monde est convaincu de cet état de fait. Pour en revenir à Servette, il y a eu un problème de formation. Le club devrait produire 1 à 2 jeunes talents par saison ce qui n’est pas le cas. C’est un vrai problème car cela implique plus d’investissement de la part d’un mécène comme Monsieur Pishyar. Il faut aussi garder à l’esprit qu’il y a une énorme différence entre la 1ère ligue et la Challenge League ainsi qu’entre la Challenge League et la Super League.

EdS : Pour la formation je vous trouve un peu dur avec Servette.

Edmond Isoz : Non c’est une réalité, à part Kusunga qui ne s’est même pas encore imposé à Bale, Tréand qui ne joue pas à Neuchatel citez moi des joueurs qui ont percé ces dernières années ? J’exclue bien sûr la période des Senderos et Zambrella.

EdS : Je veux bien comprendre que vous vouliez être élitiste mais comment justifier vous la présence de club en ASL qui n’ont pas de public ni de stade comme Bellinzone. Cette tolérance n’est pas cohérente.

Edmond Isoz : Bellinzone ne pourra plus jouer à Bellinzone l’année prochaine s’ils n’ont pas un réel projet. Mais je vous rends attentif qu’à partir de l’année prochaine, tous les clubs auront des stades modernes. Même mieux adapté que celui de Genève qui est trop grand pour un club de Super League. D’autant plus que le club ne dispose pas des droits pour les loges et de ses revenus qui sont déterminants pour la survie d’un club.

EdS : La ligue ne pourrait-elle pas intervenir auprès des responsables politiques pour faire comprendre que c’est une question de survie ? Servette est victime de la gestion désastreuse passée.

Edmond Isoz : On a déjà rencontré Mr Pishyar plusieurs fois ainsi que les gens du Stade de Genève et les gens de la ville. Tout le monde connait la situation. Mais maintenant nous ne sommes pas là pour imposer et nous n’avons de droit pour légiférer. Nous avons rendu attentif les autorités politiques que dans les autres villes, la principale source de revenu ne sont pas les spectateurs ou les droits TV qui sont négligeables en Suisse mais ce sont les loges et tout ce qui va autour.

EdS : Pour les droits TV, vous ne voyez pas d’améliorations pour l’avenir ? Ce fardeau de droits TV dérisoires ne peut-il pas être changé ?

Edmond Isoz : Je ne vois pas de changement. On peut certainement améliorer la visibilité mais pas de changement important. Comme je l’ai dit la source de revenu principale qui peut être importante vient des VIPs et du sponsoring.

EdS : L’avenir du foot Suisse passe-t’il par des structures semi-professionnelles ?

Edmond Isoz : au niveau de l’intérêt des médias et de sponsors il ne survivrait pas plus que 5 ans dans une structure semi-professionnelle. Il n’y a pas d’autre choix que d’être entièrement professionnel si on veut être compétitif au niveau national voir international. Sans vouloir se comparer à des Real Madrid ou Manchester United qui vivent une autre réalité.

Propos recueillis par Oscar Obradovic

13 réflexions sur « Edmond Isoz: « la Suisse n’a pas le potentiel sportif pour accueillir plus que 10 équipes qui tiennent la route. » »

  1. L’avenir du foot en Suisse est décidémment bien noir avec des personnages de ce genre à sa tête.

    « il n’y a tout simplement pas le potentiel. Le football, pour être joué au plus au niveau, nécessite de la qualité or il n’y a pas assez de joueurs étrangers de qualité en Suisse. »

    Mais le potentiel pour quel objectif? Pourquoi parler de joueurs étrangers? Qu’on ait 10 ou 16 équipes, elles ne seront jamais toutes au même niveau et le but de faire une compétition est justement de désigner la meilleure et la moins bonne.

    « On sait qu’un club qui monte de Challenge League en Super League change jusqu’à 9 joueurs pour pouvoir espérer se maintenir en Super League. »

    Justement parce que la transition ChL-SL est difficile car dans un championnat à 10, on est toujours menacé de relégation à la moindre mauvaise passe. Donc les équipes s’endettent pour satisfaire les exigeances pour la licence et en plus pour transférer la max de bons joueurs possible pour espérer jouer le maintien. Avoir une SL à 16 permet au néo-promu de s’adapter en douceur et donc d’avoir un projet durable viable.

    « la Suisse n’a pas le potentiel sportif pour accueillir plus que 10 équipes qui tiennent la route. »

    Qui tiennent la route par rapport à quoi? Les deux derniers de SL sont-ils si éloignés de la situation des premiers de ChL? On aura jamais 10 ni même 6 voire même 4 équipes capables de « briller » en coupe d’europe et de rivaliser pour le titre sur la durée d’une saison entière.

    « Nous cherchons simplement à avoir le championnat de la meilleure qualité possible. Aujourd’hui (…) nos jeunes joueurs talentueux partent car ils ont plus de talents que les joueurs étrangers moyens. Si on agrandit l’ASL, on va diluer le talent. »

    Justement, une ligue à 10 n’attirent pas de bons joueurs de l’étranger et ne retient pas les meilleurs jeunes suisses. donc l’argument du meilleur championnat avec les meilleurs joueurs tombe. les meilleurs joueurs du championnat partent et partiront toujours car il y aura toujours de meilleurs championnats et de meilleurs clubs à l’étranger qu’en Suisse. c’est parce que les meilleurs jouaient à l’étranger que l’équipe nationale a eu des résultats ces dernières années. à l’inverse, on voit actuellement que les internationaux qui jouent en suisse n’ont pas le rythme international.
    Agrandir la SL ne va pas diluer le talent mais laisser la place à davantage de talents. aujourd’hui, un jeune préfère aller à l’étranger que végéter en M21 en 1ère ligue puisqu’on lui laisse pas sa chance en SL. dans un championnat à 16, c’est parce qu’il y a des équipes fortes, des équipes moyennes et des équipes faibles que chacun trouve sa place et peut évoluer dans sa carrière.

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  2. Dans une ligue à 16, les équipes ne tiendraient pas la route? Que dire du Lausanne-Sport, club de seconde division helvétique dans une ligue à 16… et qui rivalise avec de très bonnes équipes européennes? Non effectivement, cette équipe ne tient pas la route.
    Cet interview de M. Isoz fait peur et montre qu’on est pas sorti de l’auberge…

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  3. Comment peut-on diluer le talent en ouvrant la SL à des clubs comme Lausanne, Servette, Lugano ? Les entraineurs eux-même se prononcent d’années en années pour un élargissement !
    La raison principale est économique, les élus actuels ne voulant bien évidemment pas partager leur gâteau.
    S’agissant du nombre trop peu nombreux de matchs pour un championnat à 14 ou 16, rien n’empêche de créer une compétition parallèle, du genre coupe de la Ligue ou coupe des Alpes…
    On n’est pas sorti de l’auberge…

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  4. C’est un détail… Mais M.Isoz est directeur (Senior Manager???) de la SFL et non pas président.
    Un peu de rigueur journalistique tout de même 😉

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  5. la formation c’est quoi son truc à Isoz… avant la faillite on etait je pense avec Bâle et GC le seul club qui voyait des joueurs persé… après la faillite il me semble qu’on est monté avec des joueurs formé au club… il verra bien on va monter et leur clouer le bec… c’est pas la formation des joueurs notre problème c’est qu’il nous faut cette gestion du stade c’est le seul point ou je suis d’accord avec Isoz le reste il faudra me dire qu’elle club est monté de 1er ligue en chalenge league avec des joueurs formé au club à part nous et lausanne…

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  6. Encore juste une petite chose pour nos amis de Berne Si la praille est trop grand, c’était aussi pour satisfaire ces grands monsieur qui voulait absolument organiser un Euro chez nous… ils étaient satisfait de l’avoir ce beau stade trop grand pour les 3 matchs de l’euro bref je suis furax

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  7. Le club devrait produire 1 à 2 jeunes talents par saison ce qui n’est pas le cas… citez moi des joueurs qui ont percé ces dernières années ?
    Xavier Hochstrasser par exemple. Ou encore Christopher Nzay. Et aussi même si ça me troue le c… de le dire Anthony Sauthier et Abdul Yoda qui ont été régulièrement titulaires avec Sion. Et il y a évidemment le cas Julian Esteban dont le passage à l’étranger a capoté pour une question de malchance chronique. Mais le talent du bonhomme ne se discute pas. Avec Tréand (qui jouait quand même régulièrement du temps d’Aeby) et Kusunga (qui aura certainement sa chance après quelques mois à l’instar d’un François Marque par exemple) ça fait quand même sept talents en quatre ans. Soit bien dans la moyenne de 1 à 2 jeunes par saison.

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  8. la SFL s’en fout de la formation. elle veut seulement une compétition qui lui rapporte du pognon. donc avec des arguments marketing qui correspondent aux critères qu’elle a déterminé.

    l’ASF, c’est le contraire. elle est obligée de miser sur la formation pour ne laisser échapper aucun talent pour ses équipes nationales.

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  9. Les arguments sont pathétiques.

    A quand un changement et quelqu’un de dynamique à la tête du foot suisse ?????

    Au lieu d’avoir aider le grand SFC lors de la faillite, il se permet de critiquer le stade. Pitoyable.

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    1. ceci dit, ce n’est aucunement le rôle de la ligue d’aider un club au bord de la faillite. parce que Baulmes aussi à ce moment-là.

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