Un petit tour et puis s’en va

Les infortunés servettiens de la cuvée actuelle ont battu un record en parcourant près de 300 kilomètres pour se faire éliminer au premier tour de la Coupe mais qu’ils se rassurent : ce genre de mésaventure est également advenu à quelques uns de leurs illustres prédécesseurs et ne préjuge pas de la suite de la saison.

Depuis la création de la  Coupe de Suisse en 1925, les couacs des Grenats dès leur entrée en lice en Coupe de Suisse sont au nombre de cinq. Petit passage en revue de la neige de Frontenex un dimanche de guerre aux rives du lac de Zoug en passant par des pelouses vaudoise et valaisanne ainsi que le tapis vert de l’ASF…

07.01.1940 : une mauvaise surprise d’emblée l’année du cinquantenaire

Cette saison-là, marquée par l’éclatement du second conflit mondial, les clubs de ligue nationale n’entrèrent en compétition qu’au quatrième tour, soit début janvier. Le tirage au sort avait réservé un savoureux derby aux relents d’antan aux Grenats : ils devaient se mesurer à UGS (1ère ligue, seconde plus haute catégorie de jeu) sur sa pelouse de Frontenex. 4000 curieux avaient bravé le froid (la pelouse était enneigée) et les Servettiens qui survolaient, invaincus, la poule romande du championnat, étaient bien entendu largement favoris. Dès le coup d’envoi, Servette attaque et un tir d’Aebi contraint le portier violet Dubelly à la première de ses nombreuses parades. Sur le corner qui suit, UGS se dégage et porte très rapidement le ballon vers l’attaque, Martin ouvre le score. Un peu désarçonnés, les Servetiens remettent l’ouvrage sur le métier en repassant à l’offensive. Toutefois, leur tactique s’appuyant sur leur maîtrise technique et consistant à redoubler de passes latérales ne s’adapte guère aux conditions de jeu. Seuls Guinchard et Buchoux sont en mesure de faire fi de ces temporisations mais ne sont pas suivis par leurs partenaires et les Eaux-Viviens ont la partie belle en se carapaçant avec beaucoup de cran dans une posture défensive et en dégageant de longs ballons toujours potentiellement dangereux. Même la blessure de Borloz, pion central dans la défense des Violets, quinze minutes avant la mi-temps ne permet pas aux Grenats de trouver la faille. A la reprise, le scénario de la domination stérile des Grenats se perpétue et à la 55ème minute de jeu, sur un nouveau coup de boutoir eaux-vivien, Chevallier double la mise pour ses couleurs.

Dix minutes plus tard, un tir de Walascheck permet aux Grenats d’espérer décrocher les prolongations mais les joueurs d’UGS, massés devant leur gardien, préserveront leur avantage jusqu’au terme. A signaler que le même jour, il était décidé de refondre les groupes régionaux de Ligue Nationale en un groupe national unique, Servette, nullement perturbé par cet affront de Frontenex, poursuivra sa marche victorieuse contre les formations alémaniques et tessinoise pour décrocher le seul titre sans défaites de son histoire. L’entraîneur de l’époque, Trello Abbeglen, passera encore plusieurs années à la tête des Grenats avant de se retirer de lui-même.

Voir à ce sujet nos deux chroniques :

https://enfantsduservette.ch/2011/09/22/un-peu-dhistoire-battre-lucerne-et-devenir-champion/

https://enfantsduservette.ch/2012/08/11/trello-un-des-plus-grands/

25.09.1976 : un colosse aux pieds d’argile

Au début de la saison, le Servette FC, second en championnat et finaliste de la Coupe la saison précédente, apparait sur le papier comme la plus forte équipe de Suisse grâce au renfort du buteur anglais Chivers, du prometteur Bertine Barberis et du solide défenseur Jean-Yves Valentini (tous deux en provenance du FC Sion). A l’Allemand Sundermann a succédé Peter Pazmandy sur le banc des Grenats. Servette prend d’emblée la tête du championnat mais une élimination décevante en Coupe d’Europe contre les Gallois de Cardiff laisse peser des doutes sur la solidité de l’alliage. Ce soupçon d’inconstance se renforcera lorsqu’à l’occasion de son entrée en Coupe de Suisse, le Servette FC se prendra les pieds dans le tapis contre Vevey (Ligue Nationale B) au terme d’une rencontre haletante suivie par 3850 personnes et dans des circonstances plutôt inquiétantes pour les Grenats. Très vivace en début de match, la formation veveysanne concède néanmoins l’ouverture du score à la demi-heure de jeu sur un shoot en pivot de Chivers laissé étrangement seul.

Chivers : une ouverture du score en trompe-l’oeil…

Alors que l’on pense la résistance des Vaudois déjà bien entamée, Bruendl égalise dans la foulée. En début de seconde période, un double coup de théâtre constitue le tournant du match. Servette se voit accorder un pénalty que Barberis ne parvient pas à loger au fond de la cage de Malnati. Quelques instants plus tard, Kudi Muller, reçoit un second carton jaune pour réclamation et est expulsé avec beaucoup de sévérité. Ce double coup du sort désarçonne les Grenats qui encaissent rapidement un second but (Durussel) et même un troisième (Bruendl) à un quart d’heure du terme. Un pénalty transformé par Joko Pfister rallumera l’espoir dans le camp grenat mais Barberis ratera encore un but tout fait à l’ultime minute, les Veveysans tenaient solidement leur os. A l’heure de l’analyse de cette défaite mortifiante, la faiblesse psychologique des Greants, dépourvus de sang-froid et de lucidité était patente : intempérance individuelle, désordre collectif… Pazmandy a encore du pain sur la planche. La méforme de Barberis, villipendé par une certaine presse alémanique suite à ses mauvaises prestations avec la Nati, est profonde, il annonce d’ailleurs qu’il déclinera sa prochaine sélection (il se ravisera). Le manque de complémentarité du trio d’attaque Chivers-Pfister-Müller, les trois ayant tendance à se marcher sur les pieds au coeur de l’attaque au lieu de déborder, restera un point problématique tout au cours de la saison. Une certaine inconstance, entrevue à Vevey et confirmée lors des matchs du printemps, coûtera finalement le titre aux Grenats battu par le FC Bâle en match d’appui. Suite au match de Vevey, le SFC déposera protêt car l’arbitre était revenu sur un décision mais le club le retirera au vu de ses chances nulles d’aboutir. Peter Pazmandy restera encore à son poste de longues années et conduira le club jusqu’au sommet de 1979 où le SFC avait collectioné les trophées.

La fin de la saison 1976-1977 avait été narrée dans la chronique :

https://enfantsduservette.ch/2012/08/04/servette-yb-brechbuhl-blesse-pfister/

27.09.1980 : triste fin de l’ère Cohannier et matérialisation d’une déchéance   

Après une décennie de lente montée en puissance du onze grenat, une page se tourne à l’été 1980 lorsque le président Cohannier laisse partir, Hamberg en Hollande, Engel et Trinchero à Neuchâtel et surtout Barberis et Andrey en France. Le milieu de terrain magique du SFC est ainsi délabré. Les renforts sont minces, seul Charlie Zwygart apporte un certain espoir, mais il se blessera bien vite. Avant d’aller affronter Martigny (première ligue) en Coupe de Suisse, les Grenats avaient derrière eux un début de championnat raté qui les voyait pointer à un triste onzième rang avec 4 points en cinq rencontres. Principal secteur montré du doigt : l’attaque, composée de jeunes éléments tardant à se mettre en valeur (Matthey, Radi, Sarrasin). Sur la pelouse octodurienne, les Valaisans imposent un jeu très rythmé à leurs adversaires; grâce à un milieu de terrain renforcé, Martigny dresse un mur face aux vélléités offensives de Servettiens à court d’idées. Rittmann ouvre le score après 19 minutes devant 2500 personnes puis Marc Schnyder égalise peu avant la mi-temps pour Servette.  En seconde mi-temps, des Servettiens sans aggressivité et déconcentrés encaissent en toute logique un second but synonyme d’élimination. Le désarroi des Grenats est immense : Lucio Bizzini, joueur exemplaire, président du syndicat des joueurs de football, se laisse aller à un vilain coup de pied sur un adversaire qui avait commis une faute (sifflée par l’arbitre !) sur lui et écope d’un carton rouge. Incapable de s’extraire des bas-fonds du classement, Servette tremblera longtemps pour sa place en LNA. Si l’entraîneur Pazmandy conservera son poste suite à cette élimination, le président Cohannier, déjà incrimé pour le rageant échec dans la course au titre la saison précédente, jettera lui définitivement l’éponge. Carlo Lavizzari lui succède, le SFC était prêt à entrer dans les années 1980 de l’argent-roi…

La combativité de Coutaz (face au buteur Rittmann) ne suffira pas

10.11.2001 ou comment s’auto-éliminer…

Par un samedi de novembre glacial, les Servettiens, tenants du trophée, se rendent dans la région d’Olten pour y affronter les pensionnaires de première ligue de Wangen. Solidement installés dans le groupe de tête en championnat, les joueurs de Lucien Favre, tombeurs du Slavia Prague et du Real Saragosse en Coupe d’Europe, apparaissent pourtant singulièrement empruntés face aux Soleurois qui ouvrent le score dès la 12ème minute. Le Brésilien Robert réplique peu après. En début de seconde mi-temps, bis repetita : Wangen reprend l’avantage mais Robert remet instantanément les pendules à l’heures. Finalement, dans tous les tous derniers instants de la partie, suite à un immense cafouillage suite à un tir sur le poteau puis un autre sur la latte, Obradovic parvient à extraire le cuir de la mêlée pour le pousser dans les filets.

Robert, auteur d’un doublé, aux prises avec un joueur de Wangen

Du côté servettien, on peut certes déplorer le manque d’investissement d’Oruma dans la partie (était-il perturbé par des différends autour de la prolongation de son contrat ?), la méforme de Claiton, la blessure de Lonfat mais comme le résumait Lucien Favre, trop heureux d’être sorti indemne de ce guêpier “nous sommes qualifiés, point final”. Point final ? Points de suspension plutôt… la suspension de Goran Obradovic, averti à deux reprises en Coupe de Suisse la saison précédente… L’ASF transforme le succès servettien en défaite par forfait et le SFC voit s’envoler le million de francs que lui aurait permis une réédition de son parcours victorieux en Coupe de la saison précédente. A l’heure des explications, il apparaitra que Lucien Favre se chargeait du contrôle des suspensions la saison précédente mais que le club avait tenu à le libérer de cette fonction au profit d’un remplaçant ne maîtrisant pas l’allemand, langue dans laquelle la suspension avait été notifiée au club grenat… Un dur revers pour le duo Trotignon-Coencas fleurant bon l’amateurisme sur le coup. Dans la foulée, le SFC enverra encore Hertha Berlin au tapis mais Lucien Favre sera démis de ses fonctions à la fin de la saison.

15.09.2012 : signe avant-coureur d’une première relégation sportive ?

Très à la peine en championnat (2 points en 8 matchs), les Grenats ont l’occasion de se remettre en selle en affrontant les modestes Zougois de Cham (1L) en Coupe de Suisse. Dans les jours précédant la partie, un nouvel entraîneur a été nommé : Sebastien Fournier, démissionnaire à Sion et déjà très lié au SFC par le passé. Le Portugais Joao Alves, artisan du retour en Super League et d’une première saison réussie dans l’élite perd son poste, victime d’une préparation bâclée de son équipe, de transferts où étaient apparues des dissensions avec le directeur sportif Arpad Soos mais aussi de l’inconstance de ses choix qui apparaissent souvent déstabilisateurs. Après une première mi-temps assez fermée, le SFC croit avoir réalisé l’essentiel lorsque Geoffrey Tréand ouvre le score.

Tréand avait pourtant ouvert la voie… (photo: servettefc.ch)

Trahis par leur condition physique déficiente et une maladresse de leur gardien Gonzalez, les Grenats concèdent cependant deux buts en fin de partie et mordent la poussière. Pour cette équipe au mental fragile, la rémission sera longue : elle enchaînera encore 4 défaites en championnat suite à cette élimination avant de relever la tête. En espérant que cela se confirme et ne soit pas trop tard…

Jacky Pasteur et Germinal Walascheck

La semaine prochaine : Decastel mate les gueux

Dernière chronique : Servette et Lucerne s’échangent leur monstre des surfaces de réparation

7 réflexions sur « Un petit tour et puis s’en va »

  1. Je me souviens de notre élimination a Vevey,j’écoutais le
    matche a la radio avec Eric Walter au commentaire.C’était
    très traumatisant,car on avait une très bonne équipe.On
    s’est rattraper les deux saisons suivantes avec plusieurs
    coupes a la clé.

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