Sion peut mettre le grappin sur un espoir genevois

SFC-Sion

Devoir laisser partir à Sion un grand espoir du cru faute d’avoir pu ou voulu lui proposer un contrat adéquat, bien triste leçon pour les dirigeants servettiens d’alors…

Champion suisse à 19 ans !

Né en 1941, André Bosson évolue à l’âge de quinze ans et demi déjà dans la première équipe d’Etoile Carouge où il profite de la science de Paul Garbani. Servette lui fait rapidement les yeux doux et cet attaquant visiblement voué à un grand avenir rejoint le contingent grenat pour la saison 1960-1961. Par bien des aspects, ce Jonquillard rappelle un glorieux ainé issu du même quartier : Lulu Pasteur et ses dons d’improvisation raffinés balle au pied…..

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Avec les juniors A d’Etoile Carouge, saison 1958-1959, André Bosson est devant, troisième depuis la droite.

Cet apport de l’enfant prodige de la Fontenette ainsi que celui du Montheysan Pierrot Georgy permet de reconstituer autour de Jacky Fatton une ligne d’attaque « poids plume » mais diablement affûtée sur le plan technique. Léo Mantula, le pourvoyeur de bons ballons dans l’entrejeu servettien se charge de façonner le nouveau venu. Dans cet effectif juvénile, dirigé par Jean Snella, Dédé Bosson se met bien vite en évidence et savoure un premier titre de champion suisse à 19 ans. Derrière Walti Heuri (16 buts), Jacky Fatton (14), il est, avec 12 réussites, le troisième meilleur buteur grenat.

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Lors du derby contre Lausanne, saison 1961-1962

Une concurrence interne de taille

La saison suivante, Servette confirme son titre mais l’entraineur Jean Snella, qui dispose d’un copieux effectif, institue un principe de rotation pour les postes de l’attaque. André Bosson est moins systématiquement aligné, l’école de recrues ajoute encore à sa peine. Ce premier coup de frein n’empêchera pas Bosson de continuer à jouer un rôle au sein de l’effectif grenat durant les saisons suivantes : à l’automne 1962, son but permet à Servette de l’emporter 0:3 à Rotterdam contre Feyenoord mais Servette perdra le match d’appui. Lors de la saison 1963-1964, l’arrivée de Lucien Leduc sur le banc servettien coïncide avec la première sélection de Bosson en équipe de Suisse : en compagnie de ses coéquipiers Schneider, Desbiolles et Maffiolo, il est surpris (0:2) par la Norvège à Zurich. Le mois suivant, il se console en égalisant contre la France au Parc des Princes (2:2).

Bosson Nati

Bien en phase avec ses compères de l’attaque Jean-Marie Schaller et Michel Desbiolles (tous trois ont été formés dans des clubs genevois !), il joue un rôle important dans la belle saison 1963-1964. Son vieux pointu réussi contre YB semblait déjà avoir ouvert la voie du titre aux Genevois jusqu’à ce que deux réussites tardives des Bernois ne ruinent les espoirs grenat. La saison suivante, Bosson est plus souvent qu’à son tour aligné en ligne médiane, son action efficace ne sera que contrecarrée par son beau-frère Maurice Meylan, limogé par Servette à la fin de la saison précédente, lors d’une finale de Coupe que Sion remporte 2:1 à la surprise générale…

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Servette-Sion, c’est un peu toujours une affaire de famille…

Un statut de semi-professionnel dénié

Durant l’automne qui suit la finale de Coupe, un drôle de feuilleton se noue entre Servette, Sion et Dédé Bosson. Ce dernier, dont la constitution physique nécessite des plages de récupération afin de pouvoir donner le meilleur de lui-même, sollicite de la part des dirigeants grenat un contrat à terme (2 ans) de semi-professionnel. A l’époque, le contrat « à vie » était la norme et, officiellement, tous les joueurs étaient amateurs. Devant la fin de non-recevoir des dirigeants servettiens, Bosson noue des contacts avec Sion. Un match à Tourbillon est alors le prétexte à une bonne grippe diplomatique pour ne pas froisser son employeur in spe. Les négociations qui se menaient jusqu’alors discrètement entre la direction grenat et leur joueur éclatent au grand jour. Servette annonce ne pas pouvoir aller au-devant des prétentions financières de Dédé Bosson. Une indemnité de transfert est convenue avec le club valaisan mais Servette souhaite y adjoindre une clause forçant le FC Sion à lui vendre son attaquant Quentin au même prix au cas où celui-ci s’intéresserait à un transfert au Servette FC. Le FC Sion s’oppose à ce dernier point, Servette suspend alors André Bosson pour son attitude durant les jours ayant précédé le match Sion-Servette alors que les dirigeants servettiens eux-mêmes avaient dans un premier temps cautionné la décision de Bosson de ne pas jouer. Le président servettien, tout en reconnaissant la fidélité de l’espoir du cru au maillot grenat, annonce que le club n’a pas les moyens d’accorder un statut financier spécial à Bosson mais qu’il est prêt « paternellement » à lui faciliter l’ouverture d’un commerce pour qu’il puisse gagner sa vie à sa guise en-dehors du football.

L’image du Servette FC vilainement égratignée

Ce marché de dupes se conclut par un départ de Bosson. Suspendu par Servette, sans salaire, il trouve un emploi de mécanicien-électricien à Sion et annonce son intention de jouer pour l’équipe locale. Servette refusant de lui accorder sa lettre de sortie, voici l’international condamné à ne plus jouer deux ans pour se libérer de son obligation contractuelle avec son employeur servettien… Léo Mantula, entretemps passé à Sion assure qu’il fera le nécessaire pour que son poulain puisse garder la main. Puis, on évoque un transfert à La Chaux-de-Fonds avant que Servette ne cède finalement deux mois plus tard. En exigeant un équivalent d’une prime d’ancienneté et un statut de semi-professionnel, André Bosson était assurément un précurseur et il faudra encore attendre une décennie pour que le professionnalisme puisse réellement se mettre en branle (cf. notre chronique « Quand Servette allait au tribunal »). Dans la presse et l’opinion publique, les choses sont limpides : les prétentions financières d’André Bosson sont probablement raisonnables et comment admettre que le minuscule FC Sion, qui vient à peine de pointer son bout du nez dans l’élite du football suisse, puisse ainsi damner le pion au Servette FC qui vient d’engloutir de grosses sommes pour des vedettes étrangères au nom ronflant mais à l’apport finalement bien maigre (Mekhloufi, Rahis…) ? Cet aigre feuilleton ternit l’image du club grenat qui sous la présidence autoritaire de Marcel Righi connaitra d’autres épisodes douloureux (licenciement de l’entraineur Roger Vonlanthen, cf. notre chronique https://enfantsduservette.ch/2012/05/04/des-fans-servettiens-sur-la-pelouse-pour-soutenir-lentraineur/) compromettant l’ancrage local et lui mettant à dos son propre public.

Un retour couronné par la Coupe de Suisse

Après un peu moins de deux saisons à Sion puis deux saisons à la Pontaise, André Bosson redevient grenat à l’été 1969. Son retour professionnel à Genève avait d’ailleurs précédé celui du footballeur puisque dès 1968, il avait repris l’entreprise familiale. Au milieu de terrain d’un onze servettien en outre renforcé par le concours de l’international Georges Perroud, c’est lui qui orchestre les opérations. Après une éclipse de cinq ans, il retrouve même la Nati le temps d’une défaite en Turquie (3:0). Malgré un bon début, la saison du Servette FC se termine par un tristounet septième rang final. La deuxième saison, guère brillante en championnat, permettra néanmoins de remporter la Coupe de Suisse. En demi-finale, Dédé Bosson crucifie le portier lausannois Burgener à deux minutes du terme d’un boulet de trente mètres (2:1). Capitaine du onze servettien, Dédé Bosson se montre très à son avantage la saison suivante lors du court parcours européen des Grenats, éliminés de façon rageante part le grand Liverpool. La carrière de joueur d’André Bosson s’éteint alors lentement : il s’éloigne quelque peu du football au grand désarroi de l’entraineur-joueur Jürgen Sundermann qui, lui aussi vieillissant, lui aurait volontiers cédé sa place de stratège à mi-terrain.

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Bosson brandit la Coupe 1971 sous le regard contrit du conseiller fédéral Nello Celio, tifoso luganais.

Reconversion d’entraineur et proximité avec le club grenat

Devenu entraineur, c’est avec Chênois qu’André Bosson obtiendra ses meilleurs résultats en parvenant à maintenir le club dans l’élite du football suisse suite au départ de Peter Pazmandy pour Servette. A noter que ses méthodes, faisant appel à la diététique, n’étaient alors pas du goût de tous mais démontraient une fois de plus ses vertus de précurseur… Resté fidèle au club grenat, André Bosson participera par exemple à une manifestation de soutien au club grenat en 1991 au moment de l’irruption des premiers déboires financiers sous la présidence Ambrosetti. Membre du hall of fame, il était naturellement présent lors du rassemblement des légendes servetiennes à l’occasion du match contre Lausanne en février dernier.

Jacky Pasteur et Germinal Walaschek

Dernière chronique : Lulu, le magicien grenat

Autres chroniques ayant pour cadre le derby du Rhône :

naissance du derby avec un sextuplé servettien

quand Servette allait au Tribunal : le cas Perroud

Hommage à Piquet

Decastel et ses pairs laminent les gueux

– Rivalité quand tu nous tiens

Quelques nouvelles du livre « Un peu d’Histoire… »

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Couverture et quatrieme de couv

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