Naissance DU derby avec un sextuplé servettien !

Sachant que les premiers Servette-Lausanne remontent quasiment au 19ème siècle et que dès les premières années du 20ème siècle Servette croisait déjà le fer pour le titre avec le FC Bâle ou Young Boys, le derby du Rhône contre Sion, du haut de ses 49 ans, fait presque encore figure de jeune adolescent, d’où peut-être tout le suc qui s’en dégage…

L’élite du football suisse : une idée neuve en Valais

Flattons le stéréotype du Genevois imbu de son incontestable supériorité footballistique et réalisons un jouissif exercice de chronologie comparée pour voir à quel point le chemin du FC Sion vers l’élite du football suisse a été poussif alors que Servette dans le même temps accumulait les titres de champion suisse. A la naissance du FC Sion en 1909, Servette a déjà un titre national à son actif. Lorsque Sion accède à la deuxième ligue en 1931, le palmarès servettien peut s’enorgueillir de 6 titres de champion. L’équipe fanion du FC Sion folàtre un temps en deuxième ligue et se mesure alors parfois à la seconde garniture de Servette ou de Lausanne en levée de rideau des rencontres de LNA. Fin 1944, la première ligue est atteinte. En 1957, Sion met le pied en LNB (Servette : 11 titres) puis finalement en LNA, profitant de la politique de formation instituée par Jacques Guhl, au terme de la saison 1961-1962 (dans l’intervalle, Servette a acquis deux titres de plus).

Le premier Servette-Sion en championnat de LNA

Le 15 septembre 1962 a lieu aux Charmilles la première édition du derby rhodanien en championnat (Servette avait auparavant bouté deux fois les Sédunois hors de la Coupe de Suisse). Servette, qui reste sur deux titres nationaux, fait déjà la course en tête après trois journées et reste, en championnat, sur une probante victoire au Hardturm (2:4). En Coupe d’Europe, les choses se présentent moins bien : le mercredi précédent, la défense grenat avait pris l’eau face aux champions de Hollande Feyenoord qui s’était imposé 1 :3 aux Charmilles. C’est donc dans une optique de rachat que le SFC rencontre le FC Sion qui pointe certes aux dernières places mais vient de marquer les premiers points de son Histoire en LNA en atomisant Lugano 7:1. A l’inter-saison, deux Servettiens avaient pris le chemin du Valais : le jeune Jacques Barlie, barré par René Schneider pour le poste de gardien et le Yougoslave Lev Mantula. Ce dernier, découvert par Jean Snella en 1959, avait largement contribué à la conquête des deux titres nationaux dans un rôle très sobre de pourvoyeur de ballons en début d’action. A Sion, outre un poste au milieu de terrain, la fonction d’entraîneur lui était également dévolue.

Lors de son ultime saison chez les Grenats

Leçon 1 : 6-0 (5-0)

Pour que les valeureux Valaisans n’aient pas fait pour rien le déplacement dans la capitale du football helvétique d‘alors, leurs hôtes ont la politesse de leur offrir, malgré la fatigue de la Coupe d’Europe, une généreuse démonstration de football technique et offensif. Le jeune Desbiolles, un pur produit du club marque deux fois, les Hongrois Pazmandy et Makay sont de chatoyantes plaques tournantes, l’Algérien Mekhloufi réalise petit pont sur petit pont et ses démarrages sont irrésistibles, Nemeth étincelle sur l’aile. Seul Fatton, blessé après 30 minutes ne peut pas participer à cette quintessence de beau jeu raffinée par plus d’un demi-siècle de fréquentation de l’élite helvétique. Alors qu’ils mènent déjà 5:0, les Genevois ont l’extrême courtoisie d’offrir un sixième but à leurs hôtes après le thé pour qu’ils ne repartent pas dans leurs pénates sans dessert. Même si cela ne parait guère évident eu égard au résultat, le meilleur Sédunois ce soir-là n’est autre que Jacques Barlie…

Peu avant son départ (provisoire !) en Valais

Leçon 2 : 4-0

Sion, qui jouait encore au Parc des Sports (Tourbillon ne sera construit qu’en 1968), était censé accueillir Servette chez lui dans le cadre de la 17ème ronde du championnat le samedi 15 mars 1963. Les Grenat étaient alors quatrième et en voie d’être dépossédés de leur couronne par Zurich ou Lausanne. La météo sur la vallée du Rhône était toutefois capricieuse ce week-end-là et ce sont finalement les Sédunois, lanterne rouge de LNA, qui font le voyage de Genève pour une rencontre placée « sous le signe de l’amitié ». Toujours bons princes, les Servettiens prêtent le temps d’une rencontre leur défenseur Desbaillet à leurs hôtes sédunois. Les Genevois ont à nouveau l’urbanité de présenter à leurs hôtes un rutilant festival offensif. Score final 4:0 (tiens ! tiens !).

Leçon comprise

Après avoir bénéficié de ces deux leçons de haut vol, il est temps que les Sédunois fassent leurs preuves. Le 15 avril en Valais, les Servettiens, pacifiquement vêtus de blanc, évoluent magnanimes sur un rythme de sénateurs, tout heureux de voir leurs cousins romands se dépêtrer un peu de la zone rouge. Pazmandy est laissé au repos, les ailiers sont de mauvaise humeur et les inters ne jouent que par intermittence. Malgré la bonne volonté évidente des Genevois pour laisser aux braves Valaisans le soin de gagner le match, il a quand même fallu la bagatelle de 86 bonnes minutes à ces derniers pour enfin marquer un but que les Servettiens étaient pourtant tout à fait disposés à leur concéder chevaleresquement. Cette réussite d’Anken fit la joie de l’affluence record de 6 000 personnes présentes au Parc des Sports et contribua au chiche mais méritoire maintien des Sédunois en LNA aux dépens de Young Fellows et Lugano (respectivement 2 et 5 points de moins)

Servette : la fin d’une époque ?      

Pour Servette, ces deux résultats sont un peu symptomatiques d’un changement d’époque : si le match aller avait encore laissé entrevoir la flamboyance qui avait conduit les Genevois vers deux titres de champion consécutifs, le piètre résultat obtenu en Valais préfigure une traversée du désert appelée à durer quasiment dix ans. A l’issue de la saison, Fatton prend sa retraite et Snella repart à Saint-Etienne, une page se tourne… Lucien Leduc arrive, maintient encore un temps Servette plus ou moins aux avant-postes mais les titres ne suivent plus…

Sion apprend vite…

Sion s’était donc maintenu en LNA. Rusés, ses dirigeants avaient compris qui donnait le la en matière de football. Après Mantula, ils recrutèrent encore les anciens Servettiens Peter Roesch, Maurice Meylan et Pierre Georgy. Cela suffit pour remporter une première Coupe de Suisse deux ans plus tard face à un adversaire dont aucune archive disponible ne permet d’établir le nom…

Dernière chronique : Yverdon-Servette : presque que de bons souvenirs

Jacky Pasteur et Germinal Walaschek

11 réflexions sur « Naissance DU derby avec un sextuplé servettien ! »

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